« Dieu, du haut des cieux, regarde les fils de l’homme, pour voir s’il y a quelqu’un qui soit intelligent, qui cherche Dieu. » (Ps 53 : 2)
Un récit grec raconte que, muni d’une lanterne, Diogène[1] errait vainement en plein jour à la recherche d’un homme vertueux.
Personne ne peut dire si cette histoire est exacte. Une chose est sûre cependant : si Diogène était en vie aujourd’hui, sa quête serait plus difficile encore. Beaucoup, en effet, semblent rejeter l’idée qu’il soit nécessaire d’adhérer à une quelconque norme morale. Les médias font constamment état de graves entorses à la morale, touchant aussi bien la vie privée que les domaines de la politique, du travail, du sport, des affaires… De nombreuses valeurs chères aux générations passées sont désormais bafouées. Les normes établies sont remises en question et souvent écartées. D’autres valeurs sont respectées verbalement, mais non dans les faits.
« Le temps où il existait une échelle des valeurs commune est révolu », déclare Alan Wolfe[2], sociologue des religions. Il dresse également ce constat : « Jamais dans l’Histoire, on n’a autant perçu la faillite des traditions et des institutions pour ce qui est d’offrir une direction morale. » Le Los Angeles Times rapporte les commentaires de Jonathan Glover[3] à propos des cent dernières années. Pour ce philosophe, l’explosion générale de la violence est en grande partie imputable au déclin de la religion et des lois morales universelles.
Autrefois, la vertu était bien définie. Soit on était honnête, fidèle, chaste et honorable, soit on ne l’était pas. Aujourd’hui, « valeurs » a remplacé « vertus ». Mais cela pose un problème, comme l’observe l’historienne Gertrude Himmelfarb[4] : « On ne peut pas dire des vertus ce qu’on peut dire des valeurs, […] que chacun a le droit d’avoir les siennes[5]. »
Dans la société libéralisée actuelle, on se croit autorisé à choisir ses valeurs, comme on choisirait ses provisions dans un supermarché. Il n’y a rien de nouveau sous le soleil (Ecc 1 : 9) : la Bible nous décrit une situation analogue à l’époque des juges : « En ce temps-là, il n’y avait point de roi en Israël. Chacun faisait ce qui lui semblait bon. » (Jg 17 : 6 et 21 : 25) « Toutes les voies d’un homme sont pures à ses yeux, mais l’Éternel pèse les cœurs. » (Pr 16 : 2)
La Parole de Dieu est donc très claire : il n’est pas question de se trouver juste par rapport à un contexte comme pouvait le faire
- Lot, à Sodome. En effet, le récit de Lot est éloquent : les hommes de Sodome cherchaient à mettre la main sur les deux envoyés[6] que Lot hébergeait, pour les connaître[7]. Lot, dans son référentiel de valeurs, pour protéger ses hôtes, propose ses filles vierges à ces hommes pervers et violents… (Gn 19 : 1 à 8)
- Agar vis à vis de sa descendance avec son mari : Gn 16 : 2 à 4… La coutume et des lois[8] de l’époque voulait que soit inscrit sur le contrat de mariage que, dans le cas de stérilité de la femme, le mari puisse avoir un enfant avec une servante choisie par elle[9]…
Dieu nous propose une référence et un fondement immuables et sûrs afin de bâtir notre vie sur le rocher des siècles qui n’est autre que Jésus-Christ (Lc 6 : 48 et Ep 2 : 20).
Ne nous conformons pas au siècle présent en remplaçant la vertu par nos valeurs fluctuantes et relatives… Mais, comme Job, disons : « Je n’ai pas abandonné les commandements de ses lèvres ; j’ai fait plier ma volonté aux paroles de sa bouche. » (Jb 23 : 12)
Notes :
[1] Il s’agit ici de Diogène le Cynique (appelé aussi Diogène de Sinope). Contemporain de Platon (4ème siècle avant notre ère), Diogène est connu dans l’imagerie populaire comme le philosophe qui habitait un tonneau. Avec le temps, le cynisme a pris une connotation péjorative de mépris et de dénigrement d’autrui, qualifiant tous ceux qui, par peur de leur propre médiocrité, rabaissent systématiquement autrui.
[2] Alan Wolfe est l’un des sociologues américains les plus réputés dans l’étude des phénomènes religieux.
[3] Philosophe et écrivain britannique.
[4] Dans « La démoralisation de la société ».
[5] L’historienne note que les valeurs « peuvent être des croyances, des opinions, des dispositions, des sentiments, des habitudes, des conventions, des préférences, des préjugés, des excentricités même, bref tout ce à quoi tient un individu, un groupe ou une société, à quelque époque et pour quelque raison que ce soit ».
[6] Ces deux envoyés n’étaient autres qu’une théophanie de la trinité.
[7] Euphémisme biblique pour « abuser d’eux ».
[8] Code d’Hammourabi.
[9] Les paragraphes 170 et 171 du Code d’Hammourabi paraissent s’appliquer dans Gn 21 : 8 à 13 nous montrant bien que la femme d’Abraham se base uniquement sur les lois et coutumes de son époque : comme le paragraphe 170 lui en donnait le droit, Abraham aurait voulu adopter pleinement et par suite admettre à la participation à son héritage Ismaël, le fils qu’il avait eu de sa concubine esclave ; il avait donné dans ce dessein un grand banquet le jour où cet enfant avait été sevré (Gn 21 : 8). Mais, par rivalité, Sara s’oppose à l’adoption. Elle dit à son époux : « Chasse cette esclave et son fils, afin que le fils de cette esclave n’hérite point avec mon fils, avec Isaac… » (Gn 21 : 10). En d’autres termes, Sara demande à Abraham d’appliquer à Ismaël le paragraphe 171 et non le 170 du Code d’Hammourabi. En effet l’exclusion du fils de la servante était un moyen d’empêcher sa pleine adoption et sa participation à l’héritage paternel suivant le paragraphe 170. On voit par le texte de la Genèse que la contrariété éprouvée par Abraham, était due à sa tendresse paternelle et non à la crainte de commettre un acte illégal : « cette chose parût très mauvaise aux yeux d’Abraham à cause de son fils » (Gn 21 : 11). La suite du texte permet d’exclure formellement le motif d’une injustice légale. Dans Gn 21 : 12 et 13 Dieu ordonne à Abraham d’accéder au désir de son épouse et il promet de donner lui-même une compensation à Ismaël, pour son exclusion de l’héritage paternel. Or il est évident que Dieu ne pouvait ordonner, ni surtout favoriser, l’accomplissement d’un acte illégal. La différence entre le Code d’Hammourabi et Gn 21 : 8 à 13, consiste en ce que Agar est la servante de Sara, tandis que dans le Code d’Hammourabi, il s’agit d’une esclave de l’époux lui-même.
La perte de la vertu accompagne la perte de la foi, sans Législateur point de Loi, c’est d’une logique implacable mais pourtant peu l’acceptent…
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