Depuis les années 1960 et 1970, le Yoga a fait son apparition en Occident suivi d’un intérêt toujours grandissant des populations. Du coup, est apparu un nombre grandissant de personnes se contorsionnant dans tous les sens, dans des positions étranges qui ne présentent de l’extérieur qu’un intérêt de prouesses physiques sans aucune considération psychique. Mais est-ce vraiment cela le Yoga ? Assurément non et c’est cela que nous allons découvrir ensemble.
Le Yoga est apparu il y a des milliers d’années en Inde, berceau d’une civilisation où de nombreuses spiritualités virent le jour. Personne ne sait exactement quand eut lieu la naissance de cette discipline, ni de quelle manière. Une légende, très riche en symboles, nous raconte comment le Yoga fut transmis à l’homme :
« Shiva, Dieu hindou, enseigna le Yoga à son épouse la déesse Parvatti dans le plus grand secret. Mais un poisson assista discrètement aux leçons. Shiva s’en rendit compte et voulut le tuer pour avoir osé braver l’interdit. Seulement, grâce au Yoga, le poisson avait atteint un rayonnement et une beauté exceptionnelle qui charma Parvatti qui plaida en sa faveur et réussit à convaincre Shiva de juste chasser l’indiscret. Le poisson partit donc et s’échoua plus tard sur les rivages de l’Inde où, à force de pratique persévérante du Yoga, il se transforma en homme. Les habitants l’appelèrent Matsyendra et l’accueillirent. Touché par cet accueil, en remerciement, il leur enseigna le Yoga. C’est ainsi que cette discipline d’origine divine fut transmise à l’homme. »
Le yoga est l’un des six darśana[1] de la philosophie védique[2]. Il est l’aspect pratique du Sâmkhya[3], le moyen de sa réalisation et de sa concrétisation dans l’individu.
Toutefois, il y a une subtilité car le Sâmkhya est athée, alors que le Yoga est théiste ! Ceci s’explique par la présence du terme Ishvara dans les Yoga-Sûtra[4]. Celui-ci est souvent attribué à un dieu, mais en fait, il s’agit surtout d’un principe absolu. On peut donc l’interpréter différemment selon le contexte culturel. Au final, cette différence entre le Sâmkhya et le Yoga n’est pas si marqué que l’on pense. Ainsi, le yoga laisse paraître la reconnaissance de Dieu alors qu’il en renie l’existence ! Ainsi, le chrétien peut avoir l’impression de « se retrouver » dans le yoga en pensant retrouver un équilibre « voulu par Dieu » alors qu’en réalité, il s’agit d’un système qui petit à petit amène à déifier l’homme et à rejeter Dieu…
Revenons sur le terme de yoga : il vient du sanskrit. Ce mot possède le même radical indo-européen que l’on retrouve dans le français joug (du latin jugum) et l’anglais yoke. D’après Gérard Huet (excellent site lexique de sanskrit) yoga (raçine : yuj) se traduit :
- véhicule, équipement, moyen, méthode, convenance, contact,
- union, jonction, zèle, soin,
- discipline, concentration d’esprit, pratique du yoga, extase ou union mystique.
Il existe différentes « voies du yoga ». Voici les quatre principales (car il en existe encore d’autres, Kundalini Yoga, Kriya Yoga…) :
- Bhakti Yoga : la voie de la dévotion où le pratiquant s’abandonne en toute confiance au divin à travers des chants, des prières, des mantras.
- Jnana Yoga : la voie de la connaissance où le pratiquant essaie d’aller au-delà du mental par la pensée, le raisonnement. Il pousse dans ses derniers retranchements la logique et tend à voir le monde à travers une connaissance éclairée.
- Karma Yoga : la voie de l’action désintéressée où le pratiquant agit d’abord pour les autres afin de se libérer de son ego. Il effectue chaque acte en pleine conscience, en union avec celui-ci sans faire intervenir son ego
- Raja-Yoga : la voie royale dont le Hatha-yoga en fait partie. Ici, l’accent est mis sur les exercices physiques, mentaux, méditatifs. Bien souvent la pratique du yoga commence par celui-ci, ce qui masque toutes les implications réelles de la pratique du yoga.
Le Raja-Yoga est parfois appelé Roi des Yogas, ou Kundalini Yoga car la Kundalini est la puissance, l’énergie que la pratique du yoga est sensée libérer pour atteindre un état d’union et de fusion avec l’univers, en passant par une amélioration de la santé physique, une meilleure connaissance de soi, un état de calme intérieur, une spiritualité supérieure…
Notes :
[1] Ce mot signifie vision ou visite de l’idole dans le sanctuaire du temple, et aussi doctrine du salut.
[2] La philosophie védique est la religion mère de l’hindouisme.
[3] Le Sâmkhya est une doctrine du salut qui vise la libération de l’être. Il énumère la constitution de l’être et trace le fonctionnement psychique de l’humain. Par l’exploration et la connaissance de notre fonctionnement profond et de notre essence, le Sâmkhya affirme l’existence d’une possibilité de se soustraire à la souffrance et d’atteindre le salut. Celui-ci ne dépend plus d’un quelconque sauveur ou d’un acte de foi vis à vis d’un dieu, mais dépend d’un travail intime et volontaire sur soi, ce qui rejoint totalement l’une des premières paroles de Satan à l’humanité : « Vous serez comme des dieux (ou comme Dieu selon les traductions) » (Gn 3 :5)
[4] Un sūtra (ou soutra, sûtra voir soûtra) désigne ce qu’on nommerait en Occident un « classique », un « canon » voire, simplement, un « livre ». Il s’agit d’un mot sanskrit signifiant « fil » et s’appliquant à des écrits spéculatifs ou philosophiques rédigés sous forme d’aphorismes.